Le domaine congéable est une spécificité de la Basse Bretagne : le "fonds" appartenait, en propriété utile, à un foncier (seigneurs, gens d'église et dans une moindre proportion roturiers) ; tandis que les "édifices" appartenaient, en propriété utile également, à une autre personne, le domanier. Ce type de bail donne cependant la possibilité d'améliorer l'exploitation agricole.
Les domaniers devaient également des corvées pour "battre, faucher, faner, rentrer les grains et les foins, pour transporter du bois, du vin, des ardoises..., pour réparer les moulins et les maisons des fonciers, avec ou sans attelage, selon les capacités de chacun" (Jean Gallet, 1992).
Le bail à domaine congéable (Dictionnaire raisonné des domaines et droits domaniaux)
"C'est une espèce de tenure singulière qui a lieu en Bretagne dans les usements de Rohan, Cornouaille, Léon, Broüerec et Tréguier.
1. L'origine en est expliquée par l'art 3 de l'usement de Tréguier en ces termes : "Lors que le propriétaire d'une maison et terres de la campagne a besoin d'argent, qu'il veut assurer les rentes d'une terre éloignée et n'avoir pas l'embarras des réparations, il donne sa terre, maison et superficie, à convenant ou domaine congéable, à la charge de payer une rente et de faire les corvées ordinaires, pour en jouir par le preneur à perpétuité, sauf le droit du seigneur propriétaire de le congédier toutefois et quand en le remboursant de ses droits convenanciers au dire de priseurs".
Le supplément de l'usement de Broüerec définit le convenant ou domaine congéable, une "espèce de contrat emphytéotique, par lequel les seigneurs ont excité les laboureurs à entreprendre les défrichements et culture en leur laissant la jouissance du fonds, à charge de certaine prestation annuelle avec faculté d'y faire des améliorations, dont ils ne pourront être expulsés qu'en leur remboursant le prix de ce qu elles se trouveront valoir lors du congément".
L'usance générale sur la juridiction dit que "le convenant ou domaine congéable tient quelque chose de la censive ou afféagement roturier [droit féodal qui consiste à démembrer un fief], de sorte que les seigneurs qui ont justice l'exercent sur les hommes de fiefs".
Et l'art 10 de l'usement de Tréguier porte que "colons doivent déclaration à chaque mutation de seigneur par tenant et aboutissant, d'autant que cette forme de tenure ressemble de près au contrat de cens, quant à la prescription des rentes".
2. Il n'y a point de temps fixé pour la durée de ces baux ils peuvent être de 99 ans et même de plus suivant l'art 4 de l'usement de Cornouaille ; celui de Broüerec art 2 prouve qu'ils peuvent être illimités ; mais quand ils seraient faits pour un certain temps il ne s'ensuit pas qu'à l'expiration ils cessent d'avoir leur exécution parce que le seigneur foncier a seul la liberté de retirer ses fonds et d'y réunir là par la voie du congément qui doit être précédé d'une estimation par experts à ses frais. Le colon ne peut contraindre le seigneur à le rembourser suivant l'art 19 de l'usement de Cornouaille.
3. Par le bail à domaine congéable, le seigneur foncier donne la jouissance de son fonds, aliène la propriété des édifices sous la simple faculté de les racheter sur le pied l'estimation qui en sera faite et se réserve un droit annuel en reconnaissance de son droit de seigneurie.
Ce bail est plus avantageux au colon que l'emphytéose en ce qu'il ne perd pas les améliorations comme l'emphytéote et qu'au contraire elles lui sont à l'avance cédées incontestablement. En effet, par bail à domaine congéable, le bailleur est censé dire au preneur : je vous accorde le fonds à titre précaire et la superficie en propriété".