Ce reliquaire morphologique, provenant de l'abbaye de Saint-Méen-le-Grand, a été réalisé pour contenir un fragment d´un os du bras de saint Judicaël, ancien roi de Bretagne à l´époque mérovingienne. La main tenant un livre, iconographie habituelle réservée aux fondateurs, fait évidemment référence au fait que ce saint personnage, après avoir conclu une paix durable avec les Francs, passe pour s´être retiré au monastère de Saint-Jean de Gaël et avoir fondé celui de Paimpont. La paix conclue en 636 avec Dagobert roi des Francs, en fit aux yeux de ses successeurs un des modèles du bon gouvernement et l´un des fondateurs de la légitimité bretonne.
La rigidité de la manche rappelle les oeuvres du XIVe siècle mais le traitement décoratif des rinceaux fleuris ainsi que la découpe en targe de l´écu armorié situent sans conteste l´objet dans la deuxième moitié du XVe siècle. La représentation du livre reproduit fidèlement un modèle de fermoir à deux courroies de cuir venant fermer celui-ci sur le milieu du plat extérieur par deux boutons plat orfévrés, modèle en usage entre le XIVe et la deuxième moitié du XVe siècle, plusieurs fois représenté sur les enluminures contemporaines. Seul le décor de ces deux fermoirs est gravé, tout le reste du décor pointillé, aussi bien sur le plat du livre que sur les côtés du bras, est exécuté à l´aide d´un ciselet. L'arrêt brutal du décor ciselé aux angles du plat du livre, indique qu'à ll'image de la pierre centrale, les quatre pierres actuellement posées sur un fond uni devaient très probablement se détacher sur un quatrefeuille d'argent doré.
Sur l´un des côtés du bras, parmi un décor de guirlandes fleuries, figurent les armes des ducs de Bretagne flanquées de part et d´autre de la devise « a ma vie », adoptée par les ducs bretons à partir de Jean IV . La forme de l´écu à échancrure, dite en targe, utilisée à partir du milieu du XVe siècle, se retrouve identique sur les monnaies émises sous les ducs François Ier et François II. Elle corrobore la tradition qui attribue la commande de ce bras-reliquaire au duc François II et à son épouse Marguerite de Foix. Les fleurs de marguerites qui composent l´ensemble du décor constituent une allusion probable au prénom de la duchesse. La devise Utinam, que l´on peut traduire par Plût à Dieu ou Fasse le ciel, incisée sur un des côtés du bas de la manche est peut-être une devise personnelle du duc. Tous ces indices concordent pour avancer une datation vers le troisième quart du XVe siècle qui pourrait plus précisément se situer autour de 1474, date du mariage de François II de Bretagne et de Marguerite de Foix. Le bras-reliquaire de Paimpont pourrait ainsi être un présent offert par le couple princier à l´occasion de son mariage.
Description de l'Abbaye de Saint-Méen en 1646. Monasticon Benedictum. XXVIII. 1. A D I V, 1 F 500, fonds La Borderie, Saint-Méen.
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Il y a dans l'abbaye de Saint-Méen un beau thrésor où l'on garde le chef, le bras et le calice de saint-Méen qui est d'argent aussi bien que le chef et le bras où sont enchâssées ces saintes reliques......on y voit encore le chef et le bras de saint Judicaël roy de Bretaigne et son corps en une autre châsse. Ce chef et ce bras sont enchâssés dans un chef et un bras d'argent...
Prêtre