Le calice de Locronan passe à juste titre pour avoir été donné par le duc François II et la duchesse Marguerite de Foix. Cette tradition rapportée par les anciens auteurs et reprise par René Couffon, se fonde sur l'existence d'un écu armorié aux armes d´alliance des deux souverains, aujourd'hui disparu, enchâssé sur le dessus du pied, à l'opposé du petit calvaire dans une cavité en tiers point renversé. Les boutons du noeud, gravés et émaillés d´un semis d'hermines, qui correspond aux armes pleines de Bretagne, confirment cette attribution, de même que la qualité de l'objet que son style situe parfaitement dans le dernier quart du XVe siècle. Le pied sans ressaut, à six lobes en accolade, dont la tranche est finement ajourée en orbevoie, la silhouette de la tige amincie de la base jusqu'à la coupe, le profil de cette dernière, largement évasé, appartiennent pleinement au style de la fin du XVe siècle. La forme du pied est comparable à celle du calice de Sibiril, de la deuxième moitié du XVe siècle, les boutons carrés posés sur la pointe, dans la tradition du XIVe siècle, se retrouvent sur le calice de Larré, mais le noeud à six niches abritant des figurines d'apôtres, relève d'un formalisme nouveau qui n´apparaît guère qu dans le dernier tiers du siècle. Les légers crénelages qui surlignent le sommet du pied et apparaissent derrière les gâbles des niches, les fins contreforts, les corps de moulures au profil nerveux, les orbevoies du noeud et les petites arcatures du sommet de la tige, rehaussés de gravure, témoignent d'une exécution extrêmement soignée dans les détails, de même que le culot de la coupe à six feuilles découpées, repoussées et appliquées.
Cette pièce d'un haut niveau de qualité présente en outre le grand intérêt de ses deux poinçons insculpés sur la coupe. Celui d'abord à l'hermine passante surmontée de l'initiale R qui signale la communauté de Rennes, le plus ancien connu pour cette ville, avec entre les pattes la lettre-date C, qui révèle comme sur les plus anciens poinçons de Nantes, l´emploi d´un alphabet dès le XVe siècle et celui d'autre part de l'orfèvre aux initiales A et M reliées par une cordelière ou un lacet à glands. Avec une quasi certitude ce dernier poinçon peut être attribué à l'orfèvre Alain Maillart, signalé à Rennes comme "orfèvre doridier" exerçant dans la deuxième moitié du XVe siècle, et dont on trouve trace dans les comptes des miseurs de cette ville autour de 1480. La commande faite à cet orfèvre en 1484, de « réparer, brunir et dorer des flacons d'argent » pour l'entrée de François d'Avaugour à Rennes prend tout son intérêt si l'on observe que ce prince n'était autre que le fils naturel du duc François II, lequel passe pour être le commanditaire avec la duchesse du calice de Locronan. Au bas de ce même acte de 1484, la signature en toutes lettres de l´orfèvre est accompagnée d´un paraphe qui reprend le principe des deux initiales A et M réunies par un lacet ornemental. Cette coïncidence troublante jette un éclairage nouveau sur la relation entre les signatures des plus anciens orfèvres et leurs poinçons.
Une patène également en argent doré est traditionnellement associée à ce calice. La représentation de saint Renan gravée en son centre l'y rattache naturellement et fonctionnellement. Toutefois, la forme du phylactère qui entoure le dessin et surtout la graphie en capitales romaines et non gothiques ne peuvent guère la faire remonter avant le début du XVIe siècle. Sa ressemblance avec des oeuvres similaires contemporaines dues à des orfèvres de Quimper permettrait de l´attribuer à un des nombreux ateliers de cette ville.
Prêtre