Quatre colonnettes tronconiques cannelées, terminées par des sphères aplaties et portées par des pieds à griffes cantonnent ce pupitre reliquaire qui présente l'étonnante particularité d'avoir été conçu pour être présenté sous deux positions. La découpe trapézoïdale des côtés, qui lorsque l'objet est posé à plat lui donne un aspect bancal, est beaucoup trop accentuée pour résulter d'une maladresse d'exécution. Cette forme, volontaire, permet de soulever l'arrière du reliquaire, de le poser sur une cale et de l'incliner vers l'avant sans danger de basculement, pour faciliter l'ostension des reliques à l'occasion des cérémonies. En réalité, comme il arrive fréquemment il y a ici deux reliquaires en un, et le reliquaire extérieur, daté de1579 par la longue inscription gravée sur sa face postérieure sert d'enveloppe à un autre plus ancien. De ce premier reliquaire ont été réemployés l'âme de bois avec son garnissage d'argent dont la tranche supérieure laissée apparente est ornée d'un décor estampé gothique, un couvercle formé de bandes d'argent à découpe intérieure dentelée, rehaussées de pierres et de cabochons montées en bâtes fermées à dents de loup. A l'intérieur de ce reliquaire, des alvéoles creusées dans le bois accueillent cinq figurines d'argent doré, un ange, un saint Jean-Baptiste, une Vierge à l'Enfant dans une niche à dais, un saint Pierre ainsi qu'un saint Christophe. Ces figurines qui présentent tous les caractères du XVe siècle, proviennent d'un reliquaire plus ancien : la figure de l´homme pourvu d´ailes à gauche, image traditionnelle de saint Mathieu dans le Tétramorphe illustre une relique identifiée au dessous, de même que celle de saint Pierre, patron de la paroisse, puisque le reliquaire est censé contenir un fragment de la chaire et de l'autel de bois de ce dernier. La jolie figurine de Vierge hanchée dans sa niche à dais, finement reprise en ciselure est à mettre en relation avec celle de l´abbaye cistercienne toute proche de Boquen. Le saint Jean-Baptiste est peut-être ici présent en tant que patron de plusieurs des commanditaires cités au dos de l´objet, quant au saint Christophe.
Quoi qu´il en soit, il s'agit bien là de toute évidence d'une recomposition faite en 1579, lors de la fabrication de l´actuel reliquaire, à l'aide de fragments jugés encore suffisamment beaux et précieux pour être remontés.
Le décor de rinceaux entrelacés du nouveau reliquaire est parfaitement représentatif du style du dernier quart du XVIe siècle. Son 'examen du décor montre parfaitement les phases du travail de l'orfèvre. Le contour des rinceaux d'abord ciselé, a été ensuite été rehaussé détaché sur un fond "azuré" de traits gravés au burin, cette dernière opération faite dans une deuxième phase du travail, à l'intérieur de chaque contour, le fond azuré n'est pas aligné comme il se devrait. Il est évident que l'orfèvre, malgré sa volonté d'imiter les modèles de la mode renaissance, a commis quelques maladresses de composition, en particulier sensibles sur la face antérieure du reliquaire. Ses initiales, G et H, gravées à la fin de la longue inscription qui détaille les commanditaires de l'objet, nobles locaux, prêtres et fabriciens, apparaissent dès lors bien comme un substitut de poinçon pour un praticien qui peut-être n'a pas eu accès à la maîtrise. Il faut noter également que l'objet ne porte pas non plus de poinçon de communauté.
Photographe