"Pour profiter de l´avantage du vide qui se trouvera entre l´ancien et le nouveau revêtement, on y fera des souterrains pour un magasin à poudre, à l´épreuve des bombes, pour serrer les vivres et pour se mettre à couvert, chose absolument nécessaire car, pour n´avoir eu qu´un petit magasin à poudre [dans la longère], comme dans plusieurs autres forts, on fut obligé, le jour du bombardement, de tenir celui du château ouvert la moitié du jour pour distribuer et renvoyer la poudre, pour remplacer celle consommée, malgré la grêle des bombes qui tombaient alentour de ce magasin et entre les charrettes chargées dont il pouvait arriver la ruine entière de la ville, à quoi on remédiera en faisant des souterrains capables de toutes les munitions nécessaires". Garengeau, 14 août 1695.
Programmés dès 1689 sur un rocher situé à 150 toises du château de Saint-Malo, les travaux du fort commencèrent vraisemblablement dès 1691-1692 sous la direction de l´ingénieur Garengeau. L´ouvrage de plan presque carré se compose d´une batterie haute percée de 16 embrasures et d´un front bastionné au sud dans lequel s´ouvre la porte monumentale précédée d´un pont-levis et d´un fossé sec. La gorge est protégée d´une attaque terrestre par un mur percé de nombreux créneaux de mousqueterie. Les édifices logistiques : magasin à poudre, hangar pour le matériel d´artillerie, corps de garde et chambre de l'officier sont regroupés dans un bâtiment faisant longère et doté de combles de manière à y loger des troupes supplémentaires en temps de guerre. Contrairement au Grand Bé, le fort dont la partie basse est battue par la mer, est construit en maçonnerie de pierre de taille de granite. Lors de l´attaque de 1695, le fort était armé de 14 canons sur affûts marins et de 3 mortiers.
En 1697, Garengeau propose d´agrandir le fort vers le nord en créant "une batterie basse et en fausse braye" pour battre "la fosse aux normands" et profiter ainsi de l´effet ricochet des boulets.
L‘enceinte extérieure du fort fut agrandie et remaniée au 18e et au début du 19e siècle pour améliorer la défense du fort du côté de la terre. Le Fort National a été classé Monument Historique par arrêté du 17 mai 1906. Restauré pendant 33 ans par Alain-Etienne Marcel, (œuvrant aujourd’hui´hui sur le Petit Bé), le fort, propriété privée depuis 1927, s´ouvre au public à chaque marée basse.