Le teillage de Keranré [Keranraiz ; Keranraix] a succédé à un moulin à farine vers 1870. Outre le moulin (agrandi vers le nord après 1835) et les installations hydrauliques (barrage - seuil, bief, déversoir et vanne), le teillage a conservé la maison d'habitation dite aujourd'hui "maison du contremaitre", un hangar de stockage pour le lin et une petite maison d'habitation qui servait de réfectoire aux ouvriers en 1952.
Au sous-sol du moulin, la "chambre des transmissions et arbres", mécanismes entrainés par la roue à aubes (à l’état de vestiges), est conservée. Il en est de même de la "chambre des spatules" et de "l'emplacement réservé aux teilleurs" doté d’un ensemble de douze "postes à espader" sur un rez-de-chaussée surélevé. Chaque "poste à espader" était constitué de dix spatules en bois (machine destinées à dégrossir la filasse). A l’extrémité des "postes à espader" se trouvait la "chambre de broyage" et la broyeuse avec une hotte pour l'aspiration des poussières (dispositif installé dans les combles). Une machine dynamoélectrique permettait d'éclairer le teillage, la maison et la cour. Au-dessus du canal de fuite, une salle sur pilotis, en appentis, était dédiée au javelage (préparation du lin en poignées). L'activité de teillage s'est finalement arrêtée en 1955. En 2005, Émile Disez, ancien teilleur a visité le moulin de Keranré : il y a décrit son travail "très difficile et dangereux" et avait amené avec lui sa fiche de paye datant de 1952.
Le teillage de Keranré constitue, au même titre que le Moulin Neuf à Le Vieux-Marché, un témoignage exceptionnel de l’activité linière dans le Trégor. L’histoire du moulin de Keranré et de ses habitants a été étudiée par Jean-Yves Andrieux dans "Teilleurs du lin du trégor. 1850-1950" (1990) et par Isabelle Guégan dans un article du Bulletin de la Société d’émulation des Côtes d’Armor consacré à l’incendie des dépendances du moulin en 1784 (2016).
Certaines machines ou objets du teillage de Keranré - dont la broyeuse - ont été mis en dépôt au Musée d'art et d'histoire de Saint-Brieuc après avoir été exposés au château de La Roche-Jagu dans le cadre de l'exposition intitulée "Temps de lin... tant de liens !" (2006). Il existerait également une maquette du moulin de Keranré conservée au Musée d'art et d'histoire de Saint-Brieuc.
Dans le cadre du contrat territorial des milieux aquatiques du bassin versant du Léguer 2016-2020, il a été proposé par Lannion-Trégor Communauté une stabilisation de la brèche du barrage (le barrage est en partie ruinée) afin de respecter la continuité écologique du cours d'eau.
Dossier d’Inventaire mis à jour en octobre 2019 par Vincent Delbruel et Guillaume Lécuillier (visite sur site réalisée le 20 août 2019 dans le cadre du stage de Master 2 de Vincent Delbruel sur les "Moulins du territoire du Schéma de cohérence territoriale du Trégor - Lannion-Trégor Communauté").
Vincent Delbruel a réalisé un recensement et une étude thématique sur les moulins dans le territoire du Schéma de cohérence territoriale du Trégor - Lannion-Trégor Communauté dans le cadre de son stage de Master 2 aménagement et collectivités territoriales à l'Université Rennes 2 en 2019 (6 mois).