Ce dossier a été ouvert rédigé par Jean-Jacques-Rioult dans le cadre d’une enquête topographique menée sur la commune de Bécherel en 1983, rédigé par Marina Gasnier dans le cadre d’une enquête thématique sur le patrimoine industriel du département d’Ille-et-Vilaine menée en 1998, puis complété par Ronan Barbedor à l’occasion d’une enquête thématique sur les patrimoines artisanaux, commerciaux et industriels de la commune réalisée en 2022.
Territoire riche en ressources en eau, avec un ruisseau et des étangs en contre-bas de la colline, Bécherel est lieu d’implantations industrielles, de différentes formes, au cours du temps. L’eau, force motrice sans cesse renouvelée, est en effet une composante essentielle des process de fabrication pour les tanneries, moulins à tan, à papier, à foulon, à grain, les forges, etc. Le vallon de la Cocheriais, en bordure de la route qui relie Dinan et Rennes, dispose de fortes ressources en eau, avec un ruisseau et des étangs. Le lieu est propice à l’installation d’activités artisanales et industrielles avec le site de la Teinture qui était utilisé par les tisserands au 17 e siècle, trois moulins, plusieurs tanneries.
Le bon fonctionnement d’une tannerie repose sur la proximité de bâtiments dédiés à chaque étape du procédé, qui peut s’étaler de un à vingt-quatre mois. D’abord la déshydratation des peaux dans un saloir et leur transformation en cuirs verts. Elles sont ensuite lessivées dans des bassins dits de reverdissage, puis immergées dans des cuves maçonnées creusées dans le sol (appelées pelains) et contenant un mélange d’eau et de chaux morte. Ces cuves sont présentes dans des ateliers clos, servant également au pelanage. Les peaux sont ensuite dépilées et écharnées dans un atelier semi-ouvert, puis trempées dans des fosses fermées (appelées basseries) contenant des solutions concentrées en matières tannantes. De nouvelles fosses accueillent ensuite les peaux pour le refaisage. La dernière étape du process est le séchage dans un bâtiment appelé « séchoir ». La présence de forêts alentours (châtaigniers et chênes) est indispensable pour la fabrication du tanin. Les écorces et le tan sont stockés dans des granges ou greniers, broyés par le moulin à eau puis par une scierie mécanique. L’atelier de corroierie travaille ensuite les peaux à l’aide de maillets. Leur répartition se fait au fil de l’eau, en fonction des besoins. Les peaux sont ensuite déposées dans des petites fosses d’un à deux mètres de profondeur. 25 à 50 cuirs y étaient entreposés, séparés par des couches de tan, dont des cuirs de courroie (cuirs forts) et crépins (cordonnerie).
D’après le rapport de L. Grillet, les scieries les plus importantes sont à Bécherel. La famille Jéhannin a mobilisé le moulin de Bécherel, puis une turbine hydraulique à vapeur, qu’elle installe en 1893, et une dynamo à proximité du moulin. Un barrage avec réfection de canaux et ouvrages de décharge est également aménagé. Un tuyau souterrain permet de faire circuler l’eau. La chute d’eau avec canalisation, la cabine avec la turbine hydraulique et la ligne électrique permettent de mettre en communication la tannerie sur le vallon et le dépôt de cuirs de Xavier Jéhanin.
La tannerie Jéhanin dispose de nombreux sites sur le territoire : le site industriel (photo 2 à 10 inclus) et la scierie à proximité directe du vallon et du ruisseau, au lieu-dit le Guérin, qui emploie 24 ouvriers en 1926 ; une tannerie au bois Guérin (photos de 11 à 17 inclus) ; le moulin de Bécherel ; le saloir à peaux et les entrepôts (photos 18 à 21 inclus) ; le dépôt de cuirs verts tenu par Xavier Jehanin (photos 22, 23) lui-même, qui emploie 6 ouvriers en 1926 ; la fabrique et magasin de galoches et de crépins, qui emploie 4 ouvriers en 1926 ; des logements pour les ouvriers (photo 24), ainsi que des entrepôts. Le patrimoine de la famille Jéhannin s’étend néanmoins encore au-delà, par la propriété de nombreux champs, prés, fermes.
Une autre tannerie de taille familiale (photos 25 à 28 inclus), la tannerie Demay, artisanale, fonctionnait également au début du 20e siècle, à la Croix Calaudry, à Longaulnay. Le site en dénivelé permettait la circulation de l’eau entre les bâtiments. La grange à tan, une fosse, un bâtiment ressemblant à un séchoir, sont toujours présents sur le site.
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